L’article 28/3 du code électoral nouveau a institué la grâce présidentielle comme mode de restauration du droit de vote. Ainsi cette disposition stipule que : « pour les personnes bénéficiant d’une mesure de grâce, l’inscription sur les listes électorales ne pourra intervenir qu’après l’expiration du délai correspondant à la durée de la peine prononcée par la juridiction de jugement s’il s’agit d’une peine d’emprisonnement, ou d’une durée de trois (03) ans à compter de la date de la grâce s’il s’agit d’une condamnation à une peine d’amende. »

Il est donc évident que la loi électorale distingue nettement les deux types de sanctions pénales. Il reste à examiner si les décrets de grâce pris en faveur des sieurs K. Wade et K. Sall visent la peine d’emprisonnement tout aussi que la peine d’amende.

Pour ce qui concerne Khalifa A. Sall, l’article premier du décret de grâce n°2019 – 1589 en date du 29 septembre 2019 dispose : « une remise des peines principales est accordée aux condamnés définitifs dont les noms suivent : 1. Khalifa Ababacar Sall etc ».

En considérant que la peine principale pour délit est la prison et/ou l’amende, il ressort de la mise en œuvre dudit décret que l’article L.28 du code électoral lui sera applicable dans son entièreté. En effet, la peine d’emprisonnement de K. Sall étant prononcée par le Tribunal correctionnel de Dakar en mars 2018 et confirmée en appel en août de la même année, la déchéance électorale permanente régie par L.29 est anéantie par les nouvelles dispositions de l’article L.28 à partir de mars 2023. S’agissant de la peine d’amende, il retrouve son droit de vote et d’éligibilité trois (03) ans après avoir bénéficié d’une mesure de grâce, c’est-à-dire depuis septembre 2022.

Par décret n° 2016-880 du 24 juin 2016, M. Karim Meissa Wade a été gracié. Toutefois l’article 2 susvisé décret dispose que : « la grâce ainsi accordée dispense seulement de l’exécution des peines d’emprisonnement restant à subir. ».

Le constat est que la décision n’est pas élargie à la peine d’amende visée à l’article L.28 nouveau. Dès lors, M. K. Wade, relativement à la peine d’amende, est sous le coup des dispositions de L.30 du code électoral aux termes desquelles « les condamnés, pour un délit quelconque, à une amende sans sursis supérieure à 200.000 FCFA, sont privés du droit de vote pendant un délai de cinq (05) ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, sous réserve des dispositions de l’article L.28 ». Or la condamnation de K. Wade étant définitive depuis mars 2015, il en résulte qu’il a déjà observé la période de cinq (05) ans durant laquelle il était privé de son droit de vote et d’éligibilité pour cause d’amende. Malgré tout, cette éligibilité retrouvée ne purge pas pour autant l’amende.

Seulement, il ne faudra pas considérer cette amende comme une sanction fiscale. En effet, L’amende est une sanction pénale prévue parmi les peines en matière correctionnelle en application des dispositions du code pénal. Elle consiste à payer une somme d’argent au Trésor public. Tandis que la fiscalité relève d’un système de perception d’impôts et de taxes régi par le code général des impôts. Il s’agit là de deux régimes juridiques différents. De plus, l’amende prononcée par l’administration fiscale ne doit pas être confondue à celle prononcée par le juge comme peine principale.

Il convient de rappeler qu’en vertu de l’article L.121 du code électoral, le dossier de la candidature à l’élection présidentielle doit comporter, entre autres pièces, une déclaration sur l’honneur par laquelle le candidat atteste être en règle avec la législation fiscale du Sénégal. Dans ce sillage, le Conseil constitutionnel, pour s’assurer de la validité des candidatures déposées et du consentement des candidats, fait procéder à toute vérification qu’il juge utile (L.125).

En conclusion, les sieurs K. Wade et K. Sall sont devenus éligibles en vertu du code électoral modifié. De plus, il ne serait pas fondé de leur opposer une quelconque amende pénale en guise d’impôt pour invalider leur candidature.

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